Le Festival de Wiltz emballé par le Ballet de Moscou

Il a suffi d'un cygne, ...

Après une petite heure de train arpentant les vallées couvertes de forêts et traversées de torrents en direction du Nord du Luxembourg, nous arrivons au 62ème festival de Wiltz.

Il est 20h, il fait encore jour et pour longtemps. Nous profitons de ce Soleil généreux du début de l’été. Puis tranquillement, nous nous installons sous l’immense aile blanche qui abrite l’arrière du château pour la durée du festival.

Pour marquer l’ouverture de l’édition 2014 de cette fête du théâtre et de la musique, les organisateurs ont choisi de nous présenter « Le lac des cygnes ». Ce must see de la danse classique est interprété par le ballet de la ville de Moscou. Clin d’œil à la naissance de l’œuvre que son créateur inventa à la demande du directeur du ballet de Moscou en 1875.

L’histoire? Une allégorie de la vie de son compositeur. Gay dans cette Russie de la fin du XIXe siècle, il tente de masquer sa préférence en entretenant des relations hétéros qui s’avèrent toujours platoniques. De ce platonicisme exacerbé, Tchaikovski fera jaillir ces élans de grâce qui, depuis plus d’un siècle, font resplendir les corps et les âmes des femmes qui les interprètent. Le prince est incapable d’aimer le cygne blanc, cette impossibilité symbolise la pensée ancrée en lui selon laquelle la femme est trop sacrée pour être envahie des désirs et plaisirs de la chaire.

Tout au long des quatre actes que dure le ballet, on voit virevolter les danseuses moscovites. Toutes en fragilité, elles donnent corps aux mélodies caressées des violons, envolées des haut bois, évadées des harpes. Par la grâce de leurs pointes, la légèreté de leurs sauts, la pureté de leurs gestes, elles font revivre une œuvre magique et nous amènent dans le monde sacré du génie.

On se prend à rêver quand la danseuse étoile s’élance dans les airs et y reste, quelques instants suspendus, au bout des bras frêles mais puissants de celui qui adule sa pureté. Après deux heures et demi de spectacle, entrecoupées d’un entracte, on repart la tête pleine de lancers de jambes vertigineux, de gestes d’une grâce sculpturale qui laissent entrevoir les heures de travail seules à la barre, face au miroir. L’envie d’habiter encore un instant la beauté des mélodies et des danses suspend nos pensées. Le cygne est mort, tout comme celui qui ne pouvait l’aimer. La nuit est tombée, nous quittons le festival bercé par nos souvenirs.

Nicolas Margot

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